Les senteurs de Cacao

La chocolaterie de lisandre

Les senteurs du cacao

Dans son ouvrage sur les produits naturels commerciale, publié à Paris en 1892, Émile Dubois faisait l’inventaire des meilleurs cacaos de l’époque. Il parle de “caraque” que nous appellerions aujourd’hui criollo, mais, cette nuance de vocabulaire mise à part, sa liste n’a pas vraiment vieilli.
Il retient en premier lieu les “cacao du Venezuela, les plus estimés et les plus cher, au non coloré : caraques de Chuao Chouni, d’Ocumare ou de San Felipe, grosses comme des olives, d’un beau gris rougeâtre ; cacao Maracaïbo, aux fèves longue et épaisse, gris-brun ; amande régulière et fine du cacao Carupana, etc.” puis viennent les “cacaos Trinidad, au fèves aplati”, les “cacao de l’équateur (Guayaquil, Carriba, Balao Malacha…) aux fèves large et aplatie, longue et brune, amer et un peu moins fine”. Suivent les “cacao du Brésil (Maragnan, para et Bahia), jugé “médiocres” s’ils sont utilisés seuls, mais indispensable dans les mélanges pour la robustesse” les “cacao de Cayenne aux amandes amères, mais riche en beurre” ferme enfin la liste les “cacao Martinique, à la chair ardoise, cacao Bourbon, la saveur vineuse, cacao de Sinnamary, à la saveur âpre et à l’odeur fumée, etc.”

Aujourd’hui, la palette du chocolatier n’est ni moins exotique ni moins variée. En témoigne l’échantillonnage proposé par les chocolatiers Robert Linxe dans son ouvrage la maison du chocolat : “Parmi les crus qui me séduisent le plus, il y a le Madagascar, très puissant en goût. Il est fort et un peu âcre, on en a plein la bouche[…]. Les cacaos de l’océan indien, au contraire, Ceylan et Indonésie, par exemple, […] sont un peu piquant, aigrelet, mais pas aigres. Très parfumé, extra quand on déguste la pâte, mais ensuite, il n’en reste rien. Il faut les mélanger avec d’autres, plus robustes. Le cacao de Caraïbes offre une personnalité ronde, souple et parfumé. L’Arriba de Trinidad, un peu âcre, fait merveille dans les mélanges […]. Le cacao de Sumatra est le plus acide de tous : il provient de montagne à la fois humide et ensoleillé. Enfin, les cacaos africains sont partout, Ghana, Togo, mais surtout Côte d’Ivoire, qui assume 70% des fournitures des fèves africaine : bien nettoyer, bien sécher et bien fermeté elle donne un bon goût de chocolat qui “cogne”, un peu agressive mais net est forte.
Comme le vin, le chocolat a ainsi ses crus, ses millésimes… Certaines plantations ont de fait une réputation comparable à celle de nos grands châteaux. Chuao, au Venezuela, et l’un de ces lieux mythiques. Elle produit un cacao légendaire, dont le nom fait depuis toujours rêver les amateurs. Un cacao fin et délicat d’autant plus rare qu’il est désormais impossible de se procurer des fèves en provenance exclusive de la plantation. Celles-ci étant mélangés à d’autres fèves de la région avant d’être vendu.


Établi au XVIIe siècle dans une région sauvage et isolé de la côte ouest de Caracas, la plantation s’étend au pied d’une montagne escarpée qui tombe à pic dans la mer des Caraïbes. Seule voie d’accès : la mer, il faut longer une côte sauvage pendant près d’une heure pour atteindre la crique de Chuao. Le bateau glisse lentement vers la plage, quelques maisons de bois, un ponton, des bateaux qui servent à transporter les fèves, Enfin, on met pied-à-terre … Dans l’ouvrage qu’il a consacré au chocolat, le chocolatier Christian Constant a raconté cet instant magique : “je m’enfonce sous le couvert, dans une atmosphère toujours aussi humide, sous les arbres tropicaux ; Manguiers très haut au feuillage découpé, immenses boqueteaux de bambou aussi haut que des immeubles, bananier plantain, arbre à pain […]. De temps à autre, un cacaoyer au fruit rouge violacé bordent le chemin entrecoupé de canaux d’irrigation. La Végétation s’épaissit et, non loin de Cannes à sucre, d’autres cacaoyers apparaissent en grands nombres. La plantation semble très homogène quant à la variété cultivée. Une trouée à ciel ouvert, deux ruelles encadrées de maisons de terres et de bambou et c’est l’église fraîchement repeintes avec son parvis cimenté où sèche encore le cacao […]. Rien n’a changé depuis des siècles.”

A Chuaoet dans toutes les plantations du monde, le décor est le même… Les hommes s’avancent entre les cacaoyers, là où s’étendait autrefois la forêt. Jour après jour, ils émondent les arbres, empêchant les branches de s’emmêlés au sommet et les contraignent à former une haute tonnelle de verdure, protégeant les fruits. Il leur faut aussi sans cesse nettoyer. Redressé les branches. Détacher celles qui sont brisées. De ces soins attentifs dépend la qualité du futur chocolat. Le soleil darde ses premiers rayons sur le cacaoyer en fleur. À l’état sauvage, ils peuvent atteindre 10 mètres de haut. Sur les plantations, on les taille à 5 ou 6 mètres pour que les cabosse soit plus facile à atteindre. On les oblige ainsi à se développer en largeur, à créer leur propre ombrage. Leurs branches doivent se toucher et former une voûte parfaite qui protège les fruits du soleil et sous laquelle les hommes des cacaoyères se déplacent aisément. Traversant l’écorces, à la manière d’un Bourgeon, les fleurs apparaissent au début de la saison des pluies s’il y en a une, en Amérique et en Afrique, ou toute l’année les régions où les saisons n’existent pas, en Malaisie, par exemple. Elles vivent à peine une journée et inondé de couleurs la plantation.
Le fruit – la cabosse – naît d’une fleur fertiliser. L’arbre peut porter des milliers de fleurs en un an, mais 1 sur 100 seulement aura cette destinée. Sur certaines plantations, la transmission du pollen se fait naturellement par l’intermédiaire des petits insectes. Sur d’autres, ce sont de jeunes filles aux gestes précis et au mains habile qui accomplissent ce travail, armée de fin pinceau… Doré par le soleil, les cabosses s’accrochent au tronc. Il semble impossible qu’un tel fruit naissent d’une fleur si petite et si délicate. Et pourtant… Le cycle de la floraison étant sans fin, elle pousse parmi les fleurs présentant en même temps tous les stades de développement. Fleurs aux étamines rose pâle, cabosse rouge violacé, pointu à une extrémité pour les criollo ; Fleurs aux étamines pigmentées de couleur violette, cabosses vertes où jaunes, tantôt allongée, tantôt arrondie pour les forasteros; couleurs multiples et variété pour les trinitarios…
Le fruit, de forme allongée, plus ou moins pointu, ressemble à un petit ballon de rugby pour les uns, un concombre ou une grosse courge pour les autres. Il se développent en 5 à 7 mois et peut atteindre jusqu’à 25 centimètres de long. Il est dur, très dur. Les précieuses graines de cacao (30 à 40 par fruit en moyenne), en forme d’amande, sont nichés à l’intérieur. Elles baignent dans une pulpe blanche aigre-douce qui, dit-on, faisait autrefois les délices des dames créoles. Quant au Maya, on sait qu’ils ignorèrent longtemps les fèves, mais il se régalait de cette pulpe acidulée et légèrement sucrée. Les meilleures amandes, celle du criollo, sont bien rondes ; on les reconnaît à leur couleur blanche, presque translucide. Celle du forasteros sont aplatis, d’un pourpre foncé profond. Celle du trinitario changent selon les variétés.
La productivité du cacaoyer dépend énormément des plantations, de la variété et de l’âge de l’arbre, de la manière dont il est entretenu et de la qualité du sol.

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